La narratrice, jeune actrice montante, se voit proposer d'incarner Regina Jonas, qui fut la première femme rabbin du monde. Cela lui paraît comme un bon moyen de solder le passé collaborationniste de sa famille, qu'elle a découvert récemment. Regina Jonas a réellement existé. C. Boulouque se sert habilement de son actrice de fiction pour remonter la piste de cette femme unique et nous livrer, par touches successives, sa biographie. La force documentaire du récit étonne : on apprend beaucoup sur le comportement des entreprises champenoises durant l'Occupation. Les grands-parents faisaient parti de la bonne bourgeoisie champenoise. La grand-mère, Irène, était une femme pleine de ressentiments, étriquée, "petite même dans l'abjection". Sa petite-fille, toutefois, n'est pas dans la repentance aveugle et comprend qu'au-delà de cette histoire familiale se profilent des questions qui valent non seulement pour la Shoah mais aussi pour les autres génocides ou tout simplement les drames plus intimes. (Livres hebdo)