Pour la romancière Cyntia Ozick, Alice Munro n'est ni plus ni moins que le Tchekhov nord-américain. Ce qui est sûr, c'est que cette Canadienne anglophone, septuagénaire, peu médiatique, native de l'Ontario et lauréate de nombreux prix, a le sens du rythme, l'art de condenser les années en trois lignes ou d'étirer une heure sur plusieurs pages. Elle maîtrise en virtuose les flash-back, les élipses, les récits parallèles. "Fugitives", comme les femmes de ce recueil de nouvelles, comme les heures. Dans la deuxième nouvelle, on a l'histoire de Juliet à trois moments de sa vie : quand, étudiante en lettres classiques et jeune prof, elle rencontre un homme, dans un train qui traverse tout le Canada, lorsque, quelques années plus tard, elle présente pour la première fois à ses parents son bébé de treize mois, puis quand sa fille Penelope la quitte pour aller faire une retraite spirituelle. Les envies de fuite qui traversent les personnages de ces romans miniatures avortent souvent. Mais parfois, aussi, le départ est définitif. (Livres hebdo)