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Ce que j'appelle oubli

Année de parution :
2011
1 vol. (61 p.) : 19 cm
Un homme entre dans un supermarché. La soif le prend en passant devant le rayon des liquides. Il prend une cannette de bière, l'ouvre et la boit. Deux vigiles l'entourent aussitôt, s'en saisissent sans ménagement et l'emmènent dans un local de sécurité. Ils le houspillent, l'injurient, le cognent. Il se débat, tente de se protéger. Les vigiles cognent de plus belle, au ventre, au visage, partout, puis le voilà à terre. Il râle et meurt. Six minutes s'écoulent avant que les vigiles relâchent la pression. Ils diront que le coeur a lâché. La scène se passe de nos jours en France. Laurent Mauvignier en fait un récit d'une seule phrase sans la moindre respiration. Comme pour provoquer notre propre suffocation. C'est bref (62 pages) mais si tendu que cela suffit. Ce n'est pas une enquête mais un geste de dégoût sublimé par l'écriture. Le narrateur s'adresse au frère de la victime pour lui raconter. Pas de pathos, ni lamentation, ni jérémiades. Inutile de convoquer le tribunal international des droits de l'homme. La littérature va plus loin. Ni lieux, ni date. Mauvignier ne dénonce personne mais son récit est le plus terrible des actes d'accusation. On apprend, ailleurs, que cette histoire lui a été inspirée par un fait divers survenu dans un "Carrefour" de Lyon il y a un peu plus d'un an. (La République des livres)